L’Europe investit 10,6 milliards d’euros dans un projet qui, avec 290 satellites, vise à concurrencer les 7 000 satellites de Starlink et à réduire sa dépendance.
L’Europe veut concurrencer Starlink
L’Union européenne entre officiellement dans l’ère de l’internet spatial sécurisé avec le lancement d’IRIS² (Infrastructure de Résilience, d’interconnectivité et de Sécurité par Satellite). Lundi dernier, la signature d’une concession de douze ans avec le consortium SpaceRISE a marqué le coup d’envoi de ce projet ambitieux, destiné à rivaliser avec des géants comme Starlink de SpaceX ou Kuiper d’Amazon.
Après les succès de Galileo (positionnement par satellite) et Copernicus (surveillance du climat), IRIS² représente une nouvelle étape majeure pour l’UE dans le domaine spatial. Ce programme prévoit le déploiement d’une constellation de 290 satellites multi-orbitaux, offrant des services de connectivité dès 2030.
IRIS² ne se limite pas à fournir un accès internet commercial. Il vise également à sécuriser les communications dans des secteurs stratégiques tels que la défense, le réseau diplomatique européen, la gestion des crises et la surveillance. Dans un contexte de compétition acharnée pour le contrôle de l’espace, ce projet est crucial pour l’autonomie et la souveraineté de l’Europe.
Face à Starlink, un défi de taille
L’arrivée d’IRIS² intervient alors que SpaceX, avec sa constellation Starlink, a pris une avance considérable, se positionnant comme un acteur majeur de l’internet par satellite à l’échelle mondiale.
Début 2024, Starlink revendiquait plus de 6 000 satellites en orbite et 2,6 millions d’abonnés, avec l’objectif d’atteindre à terme près de 30 000 satellites. L’Europe doit donc relever un défi de taille pour se faire une place sur ce marché en pleine expansion.
Un partenariat public-privé pour un projet d’envergure
Pour mener IRIS² à bien, l’Union européenne a confié la gestion du projet au consortium SpaceRISE, un partenariat public-privé mené par Eutelsat (France), Hispasat (Espagne) et SES (Luxembourg). D’autres acteurs importants du secteur spatial et des télécommunications participent également à l’aventure, tels que Thales, OHB, Airbus Defence and Space, Telespazio, Deutsche Telekom, Orange et Hisdesat.
Le budget total d’IRIS² est estimé à 10,6 milliards d’euros sur douze ans, financés conjointement par l’Union européenne à hauteur de 6 milliards d’euros, des investissements privés à 4,1 milliards d’euros et l’Agence spatiale européenne (ESA) qui financera jusqu’à 0,55 milliard d’euros.
Un enjeu de souveraineté et de compétitivité
Selon Henna Virkkunen, vice-présidente de la Commission européenne chargée de la souveraineté technologique, cette constellation « protégera nos infrastructures critiques, connectera nos zones les plus reculées et accroîtra l’autonomie stratégique de l’Europe ».
L’UE ambitionne également de nouer des partenariats internationaux autour d’IRIS², avec des discussions en cours avec le Royaume-Uni, la Norvège, l’Australie, ainsi que des pays d’Asie et d’Afrique.
Pour Eva Berneke, directrice générale d’Eutelsat, IRIS² représente un « pas en avant très important pour le spatial européen » et une marque de confiance envers son entreprise. Elle souligne l’urgence pour l’Europe de proposer « une alternative aux Américains ou aux Chinois » et de « retrouver notre souveraineté dans les domaines de la défense et des communications pour revenir dans la course ».
En clair, IRIS² est la réponse européenne aux défis de l’internet spatial : un projet pour rattraper le retard, gagner en autonomie et assurer la sécurité de ses communications.